2006 : une guerre et sa fausse victoire

 L’erreur était celle du Premier ministre. Dans la logique de cette erreur, le ministre des Affaires étrangères par intérim ne pouvait faire mieux.

OLJ / Par Chibli Mallat, le 05 janvier 2023

 

Harb Isra’il ‘ala Lubnan 2006. ‘An qissat al-qarar 1701 (La guerre d’Israël sur le Liban 2006. Sur l’histoire de la Résolution 1701) de Tarek Mitri, Arab Center for Research and Policy Studies, 2022, 212 p.

C’est sur cette pensée très personnelle que je referme ce petit livre-témoignage. La plupart de nous ont vécu ce mois terrible de juillet 2006 qui a préfiguré les effondrements ultérieurs dus à l’erreur du Premier ministre, le président n’étant qu’un personnage fantoche qui n’avait plus de voix en dehors du pays. Le Premier ministre, disait-on au lendemain du déclenchement de la guerre par le meurtre de huit soldats israéliens et l’enlèvement de deux autres soldats qui se seront avérés morts sur le coup plusieurs mois plus tard, leurs dépouilles livrées aux ravisseurs alors qu’ils auraient pu le faire le même jour pour éviter ou minimiser la guerre, le Premier ministre disait-on donc, tournait en rond dans sa cage du Sérail, furieux de voir le pays engagé par une faction, une fraction armée de son gouvernement contre son gré, dans une guerre que personne ne voulait. Après tout, tous les protagonistes libanais avaient annoncé une espèce de trêve pour l’été 2006, par-delà la fracture du pays en deux dates du mois de mars. Mais le Premier ministre n’a rien dit contre cette faction, sur sa responsabilité dans le déclenchement de la guerre. Elle a alors mis la main sur le pays.

Prisonnier de ce manque de courage, le ministre des Affaires étrangères a fait de son mieux. Comme le Premier ministre, le leader de la révolution d’alors a fait une autre erreur, encore plus grave que le silence du premier, en attribuant la victoire à la milice qui aura, drôle de victoire, entraîné la mort de plus de mille citoyens libanais pour deux dépouilles israéliennes rendues plus tard et la libération d’un prisonnier libanais qui trouvera sa mort à Damas en 2015 dans une opération probablement exécutée par Israël, mais revendiquée par les rebelles syriens. L’absurde n’a pas de fond dans la plupart des guerres. Celle de 2006 l’est particulièrement, absurde.

Les dés étaient donc bien pipés pour l’auteur témoin et protagoniste privilégié, qui a fait de son mieux pour parvenir à une résolution du Conseil de sécurité, laquelle a amené une longue trêve sur la frontière sud, mais laissé le pays aux mains du « vainqueur ». À lire le témoignage, l’on se voit rétrospectivement donnant raison à la position extrême, plus extrême encore que celle de Tel-Aviv, prônée par la secrétaire d’État américaine. Dans l’ouvrage, elle est celle qui ne veut pas que la guerre se termine avec la « victoire » de la milice libanaise. Mais le prix en aurait été plus lourd, un cessez-le feu plus tardif, des morts, encore des morts inutiles.

La position libanaise, aux mains du diplomate exemplaire, était la bonne, avec cette nuance décisive. Un cessez-le-feu à tout prix ? On est engagé par l’ouvrage dans un bal un peu sordide

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